Pourquoi les bébés pleurent-ils ?

Les pleurs des bébés sont un sujet inépuisable de controverse entre parents et entre « experts » en puériculture. Un peu comme le sommeil, d’ailleurs les deux sujets ont bien des points en commun…
Pourquoi les bébés pleurent-ils ? Faut-il les laisser pleurer ? Faut-il répondre aux pleurs et chercher à les apaiser ?
À LLL, nous pensons depuis toujours que les pleurs sont le signal que quelque chose ne va pas pour le bébé (malaise, fatigue, chaud, froid…) ou qu’il lui manque quelque chose (faim, soif, proximité avec le parent…).
Nous pensons également (et les mères le constatent tous les jours) que, bien souvent, le sein est la réponse qui va apaiser le bébé en comblant le manque ou en diminuant/faisant disparaître le malaise (qu’on pense au pouvoir antalgique de la tétée).
Et nous savons aussi qu’en pratiquant un maternage qui répond aux besoins de l’enfant (allaitement, cododo, portage), on peut non seulement apaiser les pleurs, mais aussi, dans bien des cas, éviter qu’ils surviennent.
Et pour cela, nul besoin de savoir « décrypter » les pleurs et identifier ce qui les cause.
Pourtant, innombrables sont les gadgets et les méthodes qui font croire aux parents que grâce à eux/elles ils vont pouvoir identifier si leur bébé pleure parce qu’il a faim, est fatigué, a mal, se sent seul, etc. (1)
Aussi était-ce un bonheur de découvrir les travaux de l’équipe de Nicolas Mathevon dans le Laboratoire de recherche en bioacoustique de l’Université de Saint-Étienne. Et notamment sa dernière étude en date (2) qui, grâce à l’analyse acoustique de 40 000 pleurs enregistrés de bébés, appuyée par de l’intelligence artificielle, a montré que s’il y a bien une signature acoustique propre à chaque bébé (3), il n’y a par contre pas de lien évident entre la raison du pleur et sa structure acoustique, qu’il n’existe donc pas de « pleur de la faim » ou de « pleur du sommeil », et pas de méthode qui vaille pour décoder les pleurs (4).
De quoi déculpabiliser toutes les mères qui ne sont jamais arrivées à savoir exactement pourquoi leur bébé pleure (même si on finit par avoir une idée grâce au contexte…) et qui l’ont mis au sein sans trop se poser de question (mais que l’entourage n’a pas manqué de critiquer à coup de « mais tu lui donnes le sein sans même savoir s’il a faim ! »…).
Le Pr Mathevon donnera une conférence sur le sujet au prochain congrès de LLL France, le samedi 15 novembre, à Dourdan (91) (5).

(1) Voir mon article Peut-on (et doit-on) décrypter les pleurs des bébés ?
(2) Lockhart-Bouron M et al., Infant cries convey both stable and dynamic information about age and identity, Commun Psychol 2023 ; 1 : 26.
(3) Que le parent est capable de reconnaître au milieu d’autres pleurs, comme l’ont montré des travaux antérieurs de la même équipe.
(4) Voir l’émission de France Culture du 11 octobre 2023 Ce que les bébés nous disent quand ils pleurent.
(5) Signalons également son ouvrage récemment paru, Comprendre son bébé. Le langage secret des pleurs, chez Tana éditions.

Éditorial du n° 143 d’Allaiter aujourd’hui, avril 2025.