Endormissement

Endormissement

La façon dont l’enfant est censé s’endormir et la façon dont il est censé passer la nuit sont étroitement liées. Ceux qui prônent le « sommeil solitaire » sont aussi ceux qui recommandent que l’enfant soit couché éveillé, qu’on ne l’accompagne pas dans le sommeil par une tétée, une berceuse, le bercement… Leur raisonnement – qui se tient – est que si l’on veut que l’enfant puisse se rendormir tout seul quand il se réveille dans la nuit, il faut qu’il sache s’endormir tout seul au début de la nuit.
Quelques rituels du coucher, tels que chansons, histoires, câlins, sont admis, mais on se doit de quitter l’enfant alors qu’il n’est pas encore endormi, et de l’abandonner au seul réconfort du fameux et incontournable « doudou ».
Dans presque toutes les cultures autres que la nôtre, au contraire, on accompagne l’enfant dans le sommeil : en s’allongeant à ses côtés, en l’endormant au sein, en le berçant (dans les bras, dans un berceau, ou dans un hamac comme en Amérique latine), en lui chantant des berceuses, en faisant des bruits de bouche, des tapotements rythmiques (notamment en Afrique)…
En Algérie, où l’on endort les bébés au sein, on laisse l’enfant au sein même après qu’il ait arrêté de téter, car on pense qu’il a besoin de la nefs de sa mère. « Ce terme signifie à la fois l’âme, l’odeur, l’haleine, la chaleur. Elle le protège et le nourrit autant que le lait » [1].
Une étude faite à Taïwan, où 96 % des parents restaient à côté de l’enfant pour l’endormir, parle de cet « accompagnement silencieux » comme de « la forme la plus “pure” d’accompagnement puisqu’il s’exerce sans geste particulier […] Plus que les différents rituels d’endormissement, c’est cette présence parentale qui compte le plus pour l’enfant » [2].
Exiger que, pratiquement dès la naissance, un bébé s’endorme tout seul, avec le seul réconfort d’un doudou inanimé et d’un mobile musical, en lieu et place d’un adulte aimant, c’est vraiment ne pas tenir compte des besoins réels d’un tout-petit : besoin de contact, de proximité, de chaleur et d’amour.
Soyons humains, accompagnons humainement nos bébés vers le sommeil !

[1] Voir Les rituels du coucher de l’enfant, sous la direction d’Hélène Stork (ESF éd., 1993).
[2] Ibid.

 

Extrait de Cent mots pour les bébés d’aujourd’hui, réunis par Patrick Ben Soussan, collection 1001 BB (éd. Érès, 2009).
Illustration : Sieste d’une famille chinoise, de Moritz von Schwind, vers 1860.

A propos de l'auteur

Claude Didierjean-Jouveau

Animatrice de La Leche League France, rédactrice en chef de la revue "Allaiter aujourd'hui !" Auteur de plusieurs ouvrages sur l'allaitement, la naissance et le maternage.

8 commentaires

  1. Barel

    Pouvez-vous me dire a qui appartient le tableau illustre dans l’article svp, merci!

  2. Claude Didierjean-Jouveau

    Il s’agit d’un tableau de Moritz von Schwind (1804-1871) intitulé Sieste d’une famille chinoise. Il se trouve au Wien Museum.

  3. Marie aLhomme

    <3 Je vous aime 😉
    Merci pour cet écrit !!

  4. elin

    Merci beaucoup!

  5. NAdège

    Merci pour cet article. Jusqu’à quel âge un enfant a besoin d’être accompagné dans le sommeil ? MErci

  6. Claude Didierjean-Jouveau

    Cela dépend des enfants… et aussi de ce que les parents sont prêts à faire. Certains n’en auront besoin que les premiers mois, pour d’autres, ce sera les premières années… Pas de règle absolue valable dans tous les cas (comme pour beaucoup d’autres choses d’ailleurs).

  7. Aquilegia

    Bonjour,
    maman d’un petit garçon de presque deux ans et demi, je me permets de vous écrire pour vous remercier. C’est un de vos articles, sur les pleurs des bébés, qui m’a permis de faire connaissance avec la parentalité proximale qui nous a guidés jusqu’ici, mon compagnon et moi. Notre bambin est toujours allaité (même si j’ai repris le travail), toujours en cododo (avec l’aide de votre livre) puisqu’il semble en avoir toujours besoin (il continue à téter à l’endormissement, moment merveilleux de calme et complicité, et un peu la nuit et a clairement besoin de contacts pendant la nuit), parfois encore porté dans son écharpe ou son sling (quand il fatigue en promenade)… Vos mots nous ont accompagnés au cours de cet apprentissage d’une parentalité très différente de celle pratiquée par nos parents, et si épanouissante pour notre famille. Merci. 🙂

  8. Meriem

    Bonjour ! Vos mots et vos articles m’ont apaisée et confortée dans l’idée que l’instinct parental doit être pris en compte surtout pour le sommeil de nos bébés , cependant je reste effrayée et surtout désarmée face a l’idée que mon petit bout de chou passe sa journée en pleurs quand je reprendrai le travail et qu’il faudra qu’il s’endorme en crèche. (Je refuse de lui donner une tétine et il ne veut pas de doudou) j’ai voulu lui « apprendre » a s’endormir sans moi et sans téter mais c’était trop dur pour nous deux ! Je me suis donc dit que la nature est bien faite et que si on n’y arrivait pas, c’est certainement pour de bonnes raisons. L’avenir nous le dira ! Heureuse Maman depuis 5 mois ..😄

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