De mère à mère

De mère à mère

Le 17 octobre 2016, La Leche League a fêté son soixantième anniversaire (voir ici un chapitre de l’ouvrage Seven voices, on dream, qui retrace les débuts de LLL en 1956 : Il était une fois un pique-nique).
Son but depuis toutes ces années : aider les mères partout dans le monde à allaiter, grâce à l’information, l’encouragement et le soutien de mère à mère qu’elle offre.
Mais c’est quoi, le soutien de mère à mère ?

Dans son ouvrage La psychologie de la maternité [1], Jane Price écrit : « Je suis toujours impressionnée par la facilité avec laquelle les jeunes mères réussissent à allaiter leur enfant lorsqu’elles sont aidées par des femmes de leur âge qui ont vécu la même chose et qui savent les appuyer. C’est comme cela que les femmes se sont aidées, au fil des générations. Il vaut beaucoup mieux, je pense, que les femmes considèrent leur apprentissage et l’encouragement qu’elles reçoivent plus comme une expérience de solidarité que comme l’intrusion de professionnels dans leur vie. »
Il est tout à fait vrai que dans une société où presque toutes les femmes allaitent, cette aide de mère à mère se fait spontanément, sans qu’il soit besoin de l’organiser. La femme qui accouche de son premier bébé a toujours vu autour d’elle, depuis qu’elle est petite, des femmes allaiter : les femmes de sa famille, ses voisines, ses amies, ses collègues de travail… Elle va trouver spontanément, parce qu’elle a vu faire, les bons gestes, les bons rythmes. Elle va avoir confiance dans sa capacité à allaiter. Et en cas de problème, elle va facilement trouver de l’aide.
Au contraire, dans nos sociétés où il est rare de voir des bébés téter, beaucoup de femmes adoptent, par ignorance ou parce qu’elles sont mal conseillées, des conduites d’allaitement qui les mènent tout droit à l’échec [2].
D’où l’importance des groupes de mères, initiés en 1956 par La Leche League [3] et dont l’utilité est reconnue depuis plusieurs années par les instances internationales comme l’Unicef et l’Organisation Mondiale de la Santé.
Dans ces groupes de mères, on trouve des informations, on trouve l’expérience d’autres femmes, on trouve une écoute sans jugement. On est rassurée sur la normalité de son vécu, on se sent moins isolée, on en repart pleine de force et de confiance en soi, plus sûre de ses compétences
Comme le dit Nathalie : « Les réunions permettent de se rencontrer, de voir (comment allaiter, les positions…), d’écouter, d’avoir des réponses aux questions (même les plus simples, les plus “bêtes”). Elles permettent aussi de partager expériences, vécus, joies, plénitude qu’apporte l’allaitement. Si en sortant de la réunion, on se dit : “Des femmes le font. Je suis une femme. Je peux le faire”, alors c’est gagné ! »
Ou Sophie : « Aux rencontres organisées chez les unes et les autres, j’ai découvert la joie d’échanger sur tous les sujets concernant l’allaitement, mais aussi l’éducation des enfants, et puis j’ai trouvé une grande complicité entre mamans. Et enfin on m’a communiqué des informations que je n’ai trouvées nulle part ailleurs. »
Ou encore Annie : « Enceinte de cinq mois, j’ai assisté à mes premières réunions. Quel réconfort de voir tous ces bébés au sein ! Rien que de les voir, on sait qu’on saura faire ! J’ai pu poser toutes mes questions et avoir les réponses. Oui, on peut tirer son lait quand on retravaille pour que le bébé ne reçoive que du lait maternel. Oui, on peut prendre des antibiotiques si l’on a une infection, il en existe de compatibles avec l’allaitement. Etc. etc. LLL sert aussi à ne pas arrêter d’allaiter à la première difficulté. On peut appeler les animatrices de chez soi, et c’est pratique quand on est souffrante. »
Anne-France : « Il m’a fallu le courage d’appeler l’animatrice de garde. Je m’étonne encore aujourd’hui de la qualité d’écoute dont j’ai bénéficié et donc de la qualité des conseils que j’ai reçus. »
Et enfin Leslie : « J’ai trouvé dans l’échange des témoignages le miel qui a nourri ce que je sentais depuis si longtemps au fond de moi : l’envie d’être mère à part entière ; c’est-à-dire aimer, nourrir et faire grandir un être qui vient de moi et de lui, mais qui n’est pas tout à fait moi, ni même lui. Juste lui et nous réunis. »

[1] Le Jour éditeur, 1990.
[2] Contrairement à ce qu’on pense souvent chez nous, un tel échec n’est pas anodin : outre qu’il prive le bébé des bienfaits de l’allaitement, il est aussi douloureux pour la mère. Comme le dit Jane Price dans le même ouvrage : « Il est important de reconnaître combien les premières tentatives d’une mère pour nourrir son bébé, que ce soit au sein ou au biberon, influence l’estime qu’elle a d’elle-même. Une femme qui a l’impression d’avoir échoué dès le début de sa carrière de mère se met rapidement à douter de plus en plus de ses aptitudes générales à élever son enfant. »
[3] La Leche League France, www.lllfrance.org. Toutes les associations de soutien à l’allaitement sur le site de la CoFAM.

A propos de l'auteur

Claude Didierjean-Jouveau

Animatrice de La Leche League France, rédactrice en chef de la revue "Allaiter aujourd'hui !" Auteur de plusieurs ouvrages sur l'allaitement, la naissance et le maternage.

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